Wavves + Delorean + A Fight For Love au Point FMR

Wavves, Delorean et A Fight For Love, trois sets, trois ambiances pour un tour du monde en trois escales.

A Fight For Love

 
C’est au trio français qu’il incombe la lourde tâche d’ouvrir le bal. Nimbés de lumière, les trois musiciens font leur entrée : la guitare plane, la voix se noie dans un océan de réverb’, la basse se fait lourde et vibrante, hypnotique. Le set progresse, toujours impossible d’apercevoir les trois musiciens, dissimulés par des projecteurs aveuglants, mais le son se précise, se fait plus pointu, évoluant quelque part entre The Big Pink et Depeche Mode, en danseuse sur un fil noise. Relativement efficace, si ce n’est pour cette ***** de boîte à rythme (que je pardonne aux Kills, seule exception) qui a la fâcheuse tendance de pétrifier le son, d’imposer un rythme statique et poussif qui gène l’ascension menée de front par la voix gutturale du chanteur, la basse enveloppante et la guitare stridente. Un « merci, bisous » en guise de conclusion d’un set d’une bonne demi-heure, très bien maîtrisé même s’il ne brille pas par son originalité.

Delorean

Deuxième lever de rideau pour le quatuor espagnol. Si les français l’ont joué statique mais hypnotique, clairement les espagnols ont emmené leur feria/furia jusque sur scène. Champions hors catégorie d’hairographie, ou capillographie pour les puristes : visuellement c’est un concours de cheveux balancés à droite et à gauche. Musicalement, rien à redire : un mix assez original de batterie électronique et de batterie traditionnelle (montées sur un même ensemble) donne une amplitude rythmique assez singulière, une gestion sans faille des intros et mélodies qui s’enchainent et montent en pression sans rater leurs cibles, et surtout une énergie à soulever des montagnes ultra communicative. Si la comparaison avec MGMT est facile et assez inévitable, autant le dire de suite, il n’y a pas photo : ces caballeros, loin d’être des débutants, font mieux et surtout plus authentique, moins sage et moins figé, plus sale et bien plus festif, et ressemblent plus à Devendra Banhart qu’à un danseur étoile qui aurait croisé Mick Jagger.

Wavves

Dernière étape : la Californie. Wavves, c’est l’archétype de la musique d’égoïste : impossible à écouter sur haut parleurs, le casque est obligatoire, vous pouvez donc dire au revoir à vos potes pour vous octroyer ce pur moment de plaisir solitaire. Après avoir énervé des centaines de malheureux assis à côté de mon casque criant Wavves dans le métro ou l’avion ou autre transport en commun, la place était hier soir à la curiosité : que va donner l’expérience live entouré d’autres individus ?

C’est tout simple : une énorme claque. Flanqués de ses deux débauchés ex-Jay Reatard au physique assez indescriptible (pensez à Coubiac de Parker Lewis, enroulé dans un tshirt à pois de couleur), Nathan Williams ressemble à un gamin resté bloqué dans les années 90, une tête à claque accro à sa guitare et à l’herbe. Pas professionnels pour un sou, ces trois (très) bons musiciens font de leur set une soirée entre potes, entre répétition et bœuf permanent, prennent leur temps, esquivent les bières lancées par leur public, en renvoient pas mal, les blagues fusent des deux côtés de la scène, bref un côté brut et « comme à la maison » qui colle parfaitement à leur musique. Si l’on retrouve toute l’expérimentation noise de l’album, la voix gonflée à la réverb’ noyée sous une guitare toujours saturée, la scène lorgne du côté du grunge : sale, bruyant, une énergie brute, volontairement non maîtrisée, un bulldozer sonore de tous les instants qui ne se préoccupe pas de faire dans le pointu. Souvent comparés à Pixies (ce qui est par moment assez vrai), il faudrait plutôt aller voir du côté d’un Nirvana des premiers âges (Bleach en tête). Le plaisir solitaire se fait ici collectif, aspergé de bière de tous les côtés, des orteils meurtris, des côtes qui pleurent, mais une rage brute et sans concession, chaque chanson m’extorque un gémissement ; je sors sur le Canal, épuisé, mais plus vivant que jamais.

Date : 12 décembre 2009

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