Le festival Minuit Avant La Nuit, organisé par la Lune des Pirates, prend son envol cette année pour sa deuxième édition. Après avoir enchanté les fans de shoegaze avec Slowdive et les amoureux de Bertrand Belin avec les Limiñanas, le festival amiénois nous promet une nouvelle belle édition avec une affiche qui fait la jonction entre le folk canadien d'Andrew Bird et les rapports de Caballero et JeanJass. Plus fort que le Midi Festival ? Minuit Avant La Nuit.

Minuit Avant La Nuit

Quels bilans as-tu tiré de la première édition de Minuit Avant La Nuit ? Quels ont été les retours du public ? Et celui des « institutions » ?

Antoine Grillon : On peut qualifier le bilan de la première édition comme bon. Déjà dans le contenu, on s’est mis de grosses exigences, on voulait tout faire bien dès la première année mais forcément c’est compliqué… On a beau être habitué à organiser des concerts, un festival c’est encore autre chose qu’une programmation à l’année. Donc il faudra apprendre de cela pour s’améliorer cette année. Sinon collectivement, ça nous a plu, c’est du travail supplémentaire mais c’est stimulant ! C’est aussi ça qui nous fait avancer. Sur la fréquentation on fait presque 5000 spectateurs, c’est un peu en deçà de nos attentes, notamment sur le vendredi soir… du coup on a perdu un peu d’argent, mais comme je le répète, il faut savoir faire le dos rond les 2/3 premières années pour pouvoir ensuite installer l’évenement. Mais si on fait correctement notre travail et qu’on nous donne la possibilité d’aller au bout de nos idées, on pourra mieux se rassurer dans les années à venir (j’espère !). Enfin concernant les partenaires institutionnels, ils semblent satisfaits puisqu’à priori, les soutiens sont renouvelés !

Minuit Avant La Nuit 2019

Cette deuxième édition était-elle une évidence ? Quand avez-vous décidé de poursuivre l’aventure une deuxième fois ?

Ce n’était pas si évident, notamment financièrement. Il fallait que les partenaires poursuivent leur soutien mais aussi que l’on trouve d’autres ressources financières, et réajuster certaines dépenses aussi. Même si dans notre tête il y avait cette envie collective, on est parfois rattrapés par des choses très pragmatiques… Mais globalement, on a relancé l’affaire un peu plus tôt que l’an dernier, je travaillais en off sur la programmation dès septembre aussi. On a une meilleure maîtrise du calendrier, ce qui est toujours mieux pour s’organiser et se faire connaître des publics.

MALN 2019 aura lieu sur le même site ? Le festival va-t-il proposer des choses nouvelles ?

Oui, on reste sur le même site. Pour l’instant, on ne peut pas développer le festival… donc on est plutôt dans le réajustement. D’abord, cette année, on ne fait que 2 jours dans le parc (le vendredi soir se déroule à La Lune des Pirates alors que les samedi et dimanche soir seront à St Pierre). Malgré la réussite du dimanche, « famille » lors de la première édition, la date de la fête de la musique a engendré un casse-tête et un remaniement du format. Ensuite, les scènes seront placées différemment, plus éloignées les unes des autres pour éviter les interférences… Il y aura plus de toilettes aussi, c’est important pour le confort des spectateurs, et cela faisait clairement partie des erreurs de la première année. Enfin il y a deux grands axes qui sont développés et que l’on souhaite réellement mettre dans l’ADN du festival. C’est d’abord être le plus responsable possible. Nous travaillons donc avec Amiens Métropole pour le tri des déchets, mais aussi en parallèle sur le recyclage des mégots. Nous aurons des toilettes sèches également, utiliserons des éco cups etc… Et nous allons travailler main dans la main avec l’île aux Fruits afin de proposer des produits bios et en circuit court sur les différents stands de nourriture. Deuxièmement, nous amplifions aussi le partenariat avec Arts et Jardins, souhaitant se rapprocher des Hortillonages et offrir un cadre encore plus « nature » au festival. Ainsi, certains festivaliers pourront s’évader en barque depuis le site du festival. Nous profitons ici du patrimoine exceptionnel de notre ville, c’est une vraie chance de pouvoir proposer ça à notre public. Ce sont toutes ces choses qui font que Minuit avant la Nuit n’est pas « juste » un évènement « musique ».

Andrew Bird – Sisyphus

Tu as bâti la programmation de la première édition du festival. Comment as-tu travaillé sur cette deuxième programmation ? As-tu gardé la même méthode de travail ?

Pour cette deuxième année, c’était peut-être un peu moins instinctif. La première année était très connotée shoegaze, cold wave, post punk (avec quelques projets un peu plus grand public aussi). Ce sont quand même des esthétiques assez niche, même s’il y a une forte tendance, les groupes têtes d’affiche dans cet esprit sont peu nombreux. D’autant qu’il faut qu’ils rentrent dans le budget, soient disponibles, ne soient pas posés en exclusivité sur un autre festival etc… ça devenait trop restrictif. Du coup pour cette année, on a fait évoluer la direction artistique. Peut-être plus sur un axe rock/hip hop/indé barré. Ça permet de garder une certaine continuité avec la première édition, en restant singulier dans notre proposition, mais aussi en allant chercher d’autres publics. De ce point de vue, la programmation me semble bien équilibrée. On réfléchit la programmation comme un tableau général, cohérent sur une édition, mais qui peut évoluer au fil des années. Ce qui est important c’est de garder comme objectif en tête le fait de faire découvrir un maximum de projets nouveaux et différents au public.

Tu fais venir Andrew Bird. Il va faire son grand retour avec un somptueux nouvel album et deux dates en France.. Une au Trianon… Et l’autre à Amiens. C’est ton coup de cœur ?

Non, je parlerais plutôt de coup de cœur sur des artistes plus émergents. Mais en revanche c’est une grande fierté. C’est pour ces projets aussi que l’on fait ce festival. On se bagarre pour faire venir des groupes qui ne passent pas partout, offrir un truc d’un peu exceptionnel au public c’est toujours sympa. Andrew Bird est une valeur sûre mondiale dans son domaine, c’est un nom très classe. Un monsieur qui a une grande carrière et donc que l’on a hâte d’accueillir à Amiens pour l’une de ces deux dates françaises.

L’une des autres têtes d’affiche est Balthazar. Quelles sont les relations entre l’équipe de LDP et ce groupe ? Vous aviez récemment fait jouer Warhaus, un des projets solos d’un des membres du groupe.

Il n’y a pas de relations particulières avec eux. Ils étaient venus il y a quelques années mais c’était bien avant que ça explose. Effectivement, on a accueilli Warhaus aussi… D’autres membres du groupe ont également des projets solos d’ailleurs. Mais on ne les connait pas plus que ça. Simplement, je trouve que leur musique est d’une grande qualité. Qu’il y a une singularité très forte dans leurs morceaux, ils allient délicatesse et puissance à la perfection. Ils maîtrisent l’art de la construction et de la déconstruction musicale…ça donne quelque chose de très enivrant. C’est assez impressionnant. Également c’est un groupe qui a beaucoup de charisme, des personnalités fortes, ça aide aussi à faire adhérer un public. Enfin, Balthazar c’est aussi typiquement le groupe indépendant, qui a tellement de succès qu’il peut aussi séduire un public beaucoup plus large. C’est une des grandes têtes d’affiche du festival.

Andy Shauf © Louis Teyssedou
Andy Shauf (Foxwarren) © Louis Teyssedou

Il va y avoir du hip-hop cette année à Minuit Avant La Nuit. Comment as-fais tes choix ?

On voulait ouvrir un peu plus le festival que l’année dernière aux 15-25 ans. Le rap est un biais assez logique pour cela. On peut considérer aussi que les rappeurs sont les rockeurs d’aujourd’hui, donc pourquoi pas les réunir sur un événement. Dans les choix, on souhaitait évidement rester sur des propositions de qualité, avec une petite touche indé aussi. On ne voulait surtout pas aller dans quelque chose de trop vulgaire comme il en existe beaucoup aujourd’hui. Odezenne ont vraiment leur touch, à la croisée de la chanson, de l’electro ou du rock, Caballero & JeanJass ce sont des vrais rockeurs sur scène, ça saute dans tous les sens, Aloïse Sauvage ou Roxaane, on est plus proche de la chanson, très focus sur le mot etc… Au final, le mariage de tous ces projets rendra vraiment quelque chose d’intéressant, et ça offrira un peu de diversité aussi à la programmation dans son ensemble.

Roxaane – Coeur Brisé

La play-list du programmateur

Voici 10 morceaux, liste non exhaustive et non hiérarchisée… il y a l’embarras du choix dans la programmation !

  • Foxwarren, Everything apart
    J’ai découvert ce morceau sur Nova, et je me disais que je connaissais cette voix… bien sûr, c’est celle d’Andy Shauf, chanteur australien passé par La Lune en 2017. Ce morceau est à la fois intense, rythmé et plein de dramaturgie.
  • Roxaane, Cœur Brisé
    Roxaane, de sa campagne picarde, nous livre ses problèmes de cœur. A 18 ans, sa personnalité, son flow et ses textes rend son univers particulièrement singulier.
  • Odezenne, Au Baccara
    Morceau extrait du dernier album des bordelais. J’ai une petite histoire avec ce groupe, après une première programmation à Cannes, puis à La Lune, les voici sur le festival !
  • Temples, Certainty
    A priori le nouvel album ne sera pas prêt pour MALN alors je choisis une chanson du précédent… Temples c’est un peu le Tame Impala anglais. Un mélange de psychédélisme jusque boutiste et de lignes mélodiques kitsch digne de musiques de stade. Excellent !
  • Weekend Affair, La fête est finie
    Ce duo amiéno-lillois n’a pas la renommée qu’il mérite. La fête est finie est un super single, pop et en français… ce qui nous rappelle aussi que Louis Aguilar est également un super chanteur dans la langue de Molière. Ce morceau groove encore plus en live… C’est pour dire !
  • Balthazar, I’m Never Gonna Let You Down Again
    Un des titres du nouvel album… les belges gardent leurs fondamentaux en ajoutant une touch soul qui leur réussi plutôt bien !
  • Last Train, Fire
    En attendant le nouvel album, je ressors le vieux single : Fire. C’est une balade rock’n roll percutante, où les guitares défouraillent et répondent tantôt aux silences et à la puissance toute maîtrisée de la voix cassée de Jean-Noël, le chanteur/leader. Très content de les revoir.
  • Johan Papaconstantino, J’aimerai
    A la première écoute, j’ai été un peu décontenancé. La surprise passée, j’ai adoré cet artiste à l’univers très atypique. Il contribuera à donner une touche orientale au festival le dimanche.
  • Mauvais Œil, Constantine
    Mauvais Œil c’est un peu comme si Natacha Atlas chantait sur de la musique garage voire cold wave. C’est improbable, mais Mauvais Œil tente le mariage… et le réussi plutôt bien ! A découvrir absolument.
  • Boy Azooga, Loner Boogie
    Une des attractions rock du moment en Angleterre, les jeunes gallois de Boy Azooga compilent parfaitement riffs sévères et mélodies plus pop. Et ça fonctionne bien !
  • Minuit Avant La Nuit 2019 - Playlist

    Minuit Avant La Nuit

    Avec : Andrew Bird, Balthazar, Roxaane, Structures, Last Train, Odezenne, Jaune, Foxwarren, Aloïse Sauvage
    LieuDatesSite web
    Parc Saint Pierre. Faubourg Saint Pierre - Amiens21/06/2019 au 23/06/2019site officiel
    Tarifs : Pass 2 soirées tarif réduit : 30€, Pass 2 soirées : 35€

    Pouet? Tsoin. Évidemment.

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